Vidéo virale de Tesla : livraison autonome, mais des doutes subsistent
Tesla a frappé un grand coup de communication le 27 juin en publiant une vidéo de 30 minutes montrant, selon Elon Musk, la première livraison entièrement autonome d'un véhicule Tesla. Le Model Y a effectué son trajet de l'usine Gigafactory d'Austin jusqu'à la maison d'un client, sans conducteur ni opérateur à distance. Musk a annoncé sur X (anciennement Twitter) : "La première livraison entièrement autonome d'un Tesla Model Y, de l'usine à la maison du client, y compris sur les autoroutes, vient d'être réalisée un jour avant la date prévue !!" Dans un tweet suivant, il a ajouté : "Il n'y avait personne dans la voiture et aucun opérateur à distance ne contrôlait le véhicule à aucun moment. Pleinement autonome ! Selon nos connaissances, c'est la première conduite entièrement autonome sans personne dans la voiture ou à distance sur une autoroute publique." Les vidéos, qui ont été vues près de 15 millions de fois, montrent le Model Y naviguant dans des parkings, sur des autoroutes, à des intersections et dans des rues de la ville, respectant les signaux de circulation et s'arrêtant pour les piétons. Le véhicule se gare finalement devant la maison du propriétaire, visiblement enthousiasmé par l'événement. Les fans de Tesla ont été émerveillés, louant Musk pour sa vision et son innovation. Un utilisateur a écrit : "Merci de changer le monde et notre façon de fonctionner." Un autre a ajouté : "Fantastique de voir cela arriver." Cependant, la réaction en ligne n'a pas été unanime. De nombreux utilisateurs sur X ont rapidement remis en question les affirmations de Musk. Ils ont rappelé que Waymo, la société de conduite autonome détenue par Google, a déjà revendiqué des conduites entièrement autonomes sur les autoroutes. Waymo offre depuis plusieurs mois des trajets sans conducteur à ses employés dans des villes comme Phoenix, San Francisco et Los Angeles. Un utilisateur a écrit : "Waymo a déjà revendiqué des conduites entièrement autonomes sur les autoroutes avant," en partageant un lien vers un article de janvier. D'autres ont moqué la présentation, la qualifiant de coup de communication bien orchestré. "Stupéfiant ! Donc ils viennent de montrer ce que Robotaxi fera à travers les États-Unis en 2026. Une communication magnifique, équipe Tesla !" a commenté un utilisateur, faisant référence au lancement pilote de Tesla Robotaxi quelques jours plus tôt à Austin, qui impliquait seulement une douzaine de véhicules et un superviseur humain à bord. Pour comprendre l'enjeu, il faut se pencher sur la course aux voitures autonomes, où deux approches fondamentalement différentes s'affrontent. D'un côté, Tesla mise sur son système "Full Self-Driving" (FSD), qui repose presque exclusivement sur des caméras et l'intelligence artificielle. Cette approche, appelée "Tesla Vision," s'appuie sur l'idée que si les humains peuvent conduire avec deux yeux, une voiture devrait pouvoir le faire avec huit caméras offrant une vue à 360 degrés. C'est une approche visuellement impressionnante et moins coûteuse, car elle évite l'utilisation d'équipements coûteux. De l'autre côté, des entreprises comme Waymo (filiale d'Alphabet, la maison mère de Google) utilisent des caméras et des radars, mais leur capteur clé est le LiDAR (Light Detection and Ranging). Les unités LiDAR émettent des millions de faisceaux laser par seconde pour créer une carte 3D en temps réel de l'environnement du véhicule. Cette technologie donne au véhicule une capacité de "voir" les distances, les formes et les objets avec un niveau de précision et de détail supérieurs, jour et nuit. Bien que plus coûteuse, cette approche est généralement considérée comme plus solide et redondante par l'industrie. La réalité de la situation est nuancée. Bien que le Model Y de Tesla ait navigué efficacement à travers divers scénarios réels, les affirmations de Musk quant à une première historique sont exagérées. Quelques jours avant cette vidéo, Tesla a lancé une version très limitée de son service de robotaxi à Austin, impliquant un petit nombre de voitures et des clients triés sur le volet. Chaque véhicule avait un superviseur humain à bord et était restreint à une zone géographiquement définie ("geofenced"). De plus, Waymo a passé des années à collecter des données et à valider la sécurité de ses véhicules dans ces zones avec sa flotte équipée de LiDAR. Le véritable test de l'autonomie n'est pas de savoir si un véhicule peut effectuer un trajet parfait préplanifié ; c'est de savoir s'il peut gérer des milliers de trajets imprévisibles, en toute sécurité, sur des millions de kilomètres. La question cruciale reste : si le système de Tesla est vraiment "pleinement autonome" comme le prétend la vidéo, pourquoi les robotaxis commerciaux de Tesla nécessitent-ils toujours un superviseur humain ? Musk est un excellent vendeur, et cette vidéo est sa dernière publicité convaincante. Elle vend une vision de l'avenir qui semble incroyablement proche. Mais, comme nous l'avons vu à plusieurs reprises, chez Tesla, l'écart entre une vidéo promotionnelle et la réalité quotidienne peut être immense. Jusqu'à ce que ces voitures naviguent sans filet de sécurité humaine dans de nombreuses villes, cette "première historique" reste plus un coup de communication brillant qu'une réelle avancée technologique. Dans le contexte plus large, l'industrie de la conduite autonome est un enjeu colossal. La société qui parviendra à développer une vraie autonomie de niveau 5, où une voiture peut se conduire seule n'importe où et n'importe quand, sans aucune intervention humaine, dominera non seulement l'industrie automobile, mais transformera également la logistique, les transports et la vie urbaine. Pour l'instant, Tesla a fait un pas important, mais les détracteurs restent sceptiques face à ce qui semble être une stratégie de communication axée sur la création d'une image de leadership plutôt que sur des progrès réels et vérifiables.