L'avenir de Cloud 2.0 en période d'IA pourrait échapper à Amazon
Depuis près de deux décennies, Amazon Web Services (AWS) a été le pilier de la première grande expansion du web, offrant aux startups une infrastructure cloud abordable et évolutif, leur permettant d’éviter les coûts liés aux serveurs et aux centres de données. Mais l’essor de l’intelligence artificielle générative marque aujourd’hui l’arrivée d’une nouvelle ère, surnommée « Cloud 2.0 », où les priorités des startups évoluent radicalement. Des documents internes d’Amazon révèlent que de nombreuses startups, notamment dans le domaine de l’IA, reportent désormais leur adoption d’AWS pour investir dès le départ dans des modèles d’IA, des plateformes d’inférence, des outils de développement et des « néo-clouds » spécialisés dans l’accès aux GPU. Plutôt que de s’appuyer sur les services traditionnels d’AWS comme le calcul ou le stockage, les fondateurs choisissent désormais des fournisseurs comme OpenAI, Anthropic, Vercel ou des spécialistes du GPU comme CoreWeave. Ces nouvelles technologies sont plus flexibles, moins « collantes » que les services classiques, ce qui permet un changement rapide d’opérateur. Selon des documents internes datés de mars et juillet, les startups reportent leur décision d’utiliser AWS jusqu’à un stade avancé, souvent lorsque des exigences en matière de sécurité ou de conformité deviennent critiques. Ces tendances se reflètent dans les données : alors que 59 % des startups de la cohort 2024 de Y Combinator utilisaient plus de trois services AWS (contre 63 % en 2022), 88 % ont recours aux modèles d’OpenAI et 72 % à ceux d’Anthropic. Seulement 4,3 % utilisent Bedrock, l’outil d’AWS pour accéder aux modèles d’IA. Le cas de Cursor, startup spécialisée dans le codage IA, illustre bien le phénomène : moins de 10 % de ses dépenses concernent l’infrastructure traditionnelle, le reste allant aux API d’IA et aux fournisseurs de GPU. AWS reste le leader du marché cloud, mais sa croissance a ralenti. Au deuxième trimestre, AWS a enregistré une croissance de 18 %, loin derrière les plus de 30 % de Microsoft Azure et Google Cloud. Les nouveaux acteurs spécialisés dans l’IA, comme CoreWeave ou Nebius, connaissent des croissances supérieures à 200 %, bien que depuis une base plus faible. Les analystes soulignent que AWS est perçu comme en retard dans l’IA, notamment en matière de prix des GPU — 90 % des startups du fonds Radical Ventures préfèrent des concurrents en raison des coûts plus élevés d’AWS. Le géant de la tech tente de réagir. Il a noué un partenariat stratégique avec Anthropic, dont l’utilisation de ses services pourrait générer jusqu’à 5,6 milliards de dollars de revenus d’ici 2027. Il a aussi réduit de 45 % le prix de ses instances GPU. Toutefois, des documents internes montrent que AWS peine à identifier les startups émergentes, notamment les solopreneurs ou équipes bootstrapped, et que son modèle de découverte basé sur les fonds de capital-risque est obsolète. Enfin, la réputation d’AWS dans le monde de l’IA est affaiblie : ses dirigeants sont moins sollicités aux conférences, et les investisseurs doutent de sa capacité à rester au sommet. Bien que AWS affirme que les startups choisissent toujours AWS à long terme, les signes d’un changement structurel sont inquiétants. L’avenir du cloud dépend désormais non pas seulement de l’infrastructure, mais de la capacité à capter les startups dès leurs premières étapes — un défi que AWS doit relever pour préserver sa domination.