L’année 2025 en détails : l’ascension d’Intel, les tensions chip entre États-Unis et Chine, et la guerre des exportations qui secoue le monde semi-conducteur
2025 a été une année mouvementée pour le marché des semi-conducteurs aux États-Unis, marquée par des tensions géopolitiques croissantes, des réformes industrielles profondes et une course effrénée pour dominer l’intelligence artificielle. L’année a vu l’entrée en fonction de Lip-Bu Tan à la tête d’Intel, une entreprise en quête de renaissance, tandis que les administrations Biden et Trump ont tracé des chemins divergents en matière de régulation des exportations de puces IA. En janvier, Joe Biden a proposé un ordre exécutif ambitieux visant à imposer une classification en trois niveaux pour les exportations de puces IA, visant à restreindre l’accès des pays tiers, notamment la Chine, aux technologies les plus avancées. Cette initiative, qui aurait créé un cadre rigoureux pour limiter les ventes aux pays « Tier 2 » et « Tier 3 », a été officiellement abandonnée en mai, après que le gouvernement Trump a décidé de repenser sa stratégie. La réaction du marché a été immédiate. En février, des sénateurs comme Elizabeth Warren et Josh Hawley ont pressé le nouveau secrétaire au Commerce, Howard Lutnick, d’approfondir les restrictions, notamment sur le modèle H20 d’Nvidia, utilisé dans le développement du modèle R1 de DeepSeek. Ce dernier, lancé le 27 janvier, a provoqué une onde de choc dans le secteur technologique, suscitant des craintes que la Chine puisse rattraper son retard en IA grâce à des modèles open-source. En avril, Nvidia a été frappé par une nouvelle exigence d’autorisation d’exportation pour son H20, entraînant des pertes estimées à 5,5 milliards de dollars pour le premier trimestre 2026. À la suite de ces restrictions, le PDG Jensen Huang a été vu à Mar-a-Lago, alimentant des rumeurs selon lesquelles un accord pourrait être conclu en échange d’investissements dans des centres de données américains. En réponse, Nvidia a annoncé qu’il ne compterait plus la Chine dans ses prévisions de revenus et de profits. Parallèlement, Intel a entamé une refonte majeure. Dès son arrivée en mars, Lip-Bu Tan a annoncé la spin-off de ses activités non stratégiques, notamment son unité réseau et bord, et a lancé une initiative de production de puces personnalisées. En avril, la société a confirmé des licenciements massifs (21 000 emplois prévus), ainsi qu’un plan de réduction des opérations en Allemagne et en Pologne. En juin, des suppressions d’emploi touchant 15 à 20 % du personnel de son unité de fabrication (Intel Foundry) ont été annoncées. Le gouvernement américain a également pris une participation de 10 % dans Intel, transformant des subventions existantes en actionnariat, avec une clause pénale si la part d’Intel dans son programme de fabrication tombe en dessous de 50 %. Parallèlement, SoftBank a investi 2 milliards de dollars dans la société, renforçant sa position stratégique. En juillet, la tension s’est accrue autour de la vente de puces en Chine. Nvidia et AMD ont obtenu une licence pour vendre leurs puces IA dans le pays, moyennant un versement de 15 % du chiffre d’affaires à Washington. Ce geste, perçu comme une concession, était lié à des négociations commerciales sur les terres rares. Le même mois, un accord historique avec les Émirats arabes unis, visant à vendre des puces Nvidia pour des milliards de dollars, a été mis en suspens en raison de craintes de contrebande vers la Chine. En août, Nvidia a publié un trimestre record, avec une croissance de 56 % de son chiffre d’affaires dans les centres de données. Cependant, les pressions politiques ont persisté : Trump a exigé la démission de Lip-Bu Tan, sans préciser les motifs, tandis que des rumeurs de tarifs douaniers sur l’industrie des semi-conducteurs ont circulé sans être concrétisées. À l’échelle du secteur, AMD a poursuivi son expansion par l’acquisition de startups spécialisées en logiciels d’optimisation (Brium) et en photonique (Enosemi), renforçant sa position face à Nvidia. En fin de compte, 2025 a illustré la complexité d’un équilibre entre innovation technologique, compétitivité industrielle et sécurité nationale. Les décisions prises cette année ont profondément marqué la trajectoire du secteur, établissant un cadre où la géopolitique et la stratégie industrielle s’entremêlent étroitement.