IA et robots conçoivent des nanoparticules sur mesure pour une livraison de médicaments plus efficace
Des ingénieurs en biotechnologies de l’université Duke ont conçu une plateforme innovante combinant des techniques de laboratoire automatisées et l’intelligence artificielle (IA) pour concevoir des nanoparticules destinées à améliorer la délivrance de médicaments. Cette approche, publiée dans la revue ACS Nano, vise à surmonter les obstacles liés à l’encapsulation de molécules thérapeutiques difficiles à transporter, en optimisant à la fois les composants et leurs proportions. Dans un premier essai, l’équipe a utilisé cette plateforme pour développer des nanoparticules capables de délivrer efficacement le venétoclax, un médicament chimiothérapeutique utilisé contre la leucémie. Les résultats montrent que les nanoparticules encapsulant ce composé présentent une solubilité améliorée et une capacité accrue à inhiber la croissance des cellules leucémiques in vitro, comparées au médicament non encapsulé. Dans un deuxième cas d’étude, la plateforme a permis de réduire de 75 % l’utilisation d’un excipient potentiellement cancérigène dans une autre formulation anticancéreuse, sans compromettre l’efficacité du traitement, tout en améliorant sa biodistribution chez des souris. Le principal défi actuel dans la conception de nanoparticules réside dans la complexité de la formulation : la performance dépend non seulement du choix des matériaux, mais aussi de leurs proportions. Les outils d’IA existants sont souvent limités à l’un ou l’autre aspect — soit la sélection des matériaux, soit l’optimisation des ratios — ce qui entrave leur efficacité globale. De plus, les modèles complexes nécessitent de grandes quantités de données, tandis que les approches simples peinent à distinguer des matériaux similaires. Pour répondre à ces limitations, Zilu Zhang et Daniel Reker ont développé TuNa-AI (Tunable Nanoparticle platform guided by AI), une solution intégrée qui combine robotique de laboratoire et apprentissage automatique. Grâce à un système d’administration liquide automatisé, ils ont généré un jeu de données de 1 275 formulations différentes, combinant divers principes actifs et excipients. L’IA a ensuite analysé ces données pour identifier les combinaisons optimales, permettant une meilleure formation de nanoparticules stables. Le modèle TuNa-AI a permis une augmentation de 42,9 % du taux de formation réussie de nanoparticules par rapport aux méthodes classiques. Cette avancée ouvre la voie à une conception plus rapide, plus précise et plus sûre de systèmes de délivrance de médicaments, notamment pour des traitements ciblés dans des maladies difficiles à traiter. Les chercheurs prévoient d’étendre la plateforme à d’autres biomatériaux et applications thérapeutiques et diagnostiques, tout en collaborant avec des cliniciens et des équipes de recherche internes et externes. « Cette plateforme représente une avancée fondamentale pour concevoir des nanoparticules adaptées aux traitements », affirme Reker. « Nous sommes désormais en mesure d’améliorer l’efficacité et la sécurité des thérapies existantes, tout en accélérant le développement de nouvelles solutions. » Experts du secteur soulignent que cette approche représente une véritable rupture dans le développement de formulations complexes. Elle permet de passer d’une méthode empirique à une conception prédictive, réduisant ainsi les coûts et les délais de développement. L’application de l’IA au stade de formulation, jusque-là négligé, pourrait transformer l’industrie pharmaceutique en rendant les traitements plus ciblés, plus sûrs et plus accessibles.