Google échappe à la scission, les rivaux de l'IA en profitent
Après près de cinq ans de procédure, le juge fédéral américain Amit Mehta a rendu son verdict dans l’affaire antitrust intentée par le Département de la Justice contre Google, confirmant que l’entreprise détient un monopole sur les moteurs de recherche et la publicité en ligne, tout en imposant des mesures restreintes. Google n’est pas contraint de vendre Chrome ou Android, une décision qui constitue un gain majeur pour l’entreprise, car ces produits restent des leviers essentiels pour distribuer ses services et collecter des données. Cependant, le juge a interdit à Google de conclure des accords exclusifs avec des partenaires comme Apple pour garantir sa position de moteur de recherche par défaut. Les paiements existants, comme les 20 milliards de dollars versés à Apple en 2022, sont autorisés, à condition qu’ils ne soient pas exclusifs. Cette décision est un soulagement pour Google, qui peut ainsi conserver son avantage de distribution tout en évitant une scission qui aurait profondément affaibli son modèle économique. Elle est également favorable à Apple, qui continue de bénéficier de ces revenus importants. Elle ouvre aussi la voie à une collaboration plus étroite entre Apple et Google dans le domaine de l’IA, notamment avec le développement de Gemini. Les grands gagnants sont aussi les concurrents d’IA comme OpenAI et Perplexity. Grâce à la possibilité pour Apple d’intégrer d’autres moteurs de recherche sur l’iPhone, ChatGPT pourrait désormais figurer en tant que solution de recherche, ce qui représente une opportunité majeure en matière de distribution. De plus, Google devra partager certaines données de recherche et d’interaction utilisateur avec des concurrents qualifiés, ce qui pourrait renforcer leurs offres d’IA. En revanche, les perdants sont nombreux. Les concurrents de Chrome, tels que Edge, Safari ou le nouveau navigateur Comet de Perplexity, voient leurs chances réduites face à un Chrome protégé. Les éditeurs de contenu, représentés par la News/Media Alliance, sont inquiets : le partage de données pourrait accélérer l’essor des chatbots d’IA, poussant les utilisateurs vers des « parcours sans clic », ce qui réduit drastiquement le trafic vers leurs sites et leur revenu publicitaire. Ils dénoncent l’absence d’un droit d’opt-out pour leur contenu utilisé dans les modèles d’IA de Google. Les critiques, dont la sénatrice Amy Klobuchar et des experts comme Gabriel Weinberg de DuckDuckGo, jugent les mesures insuffisantes. Elles ne remettent pas en cause le pouvoir monopolistique de Google, surtout dans le domaine de l’IA, et risquent de freiner l’innovation. Certains craignent aussi que le partage de données ne pose des questions de vie privée et de sécurité nationale. Malgré ces inquiétudes, certains analystes estiment que le jugement est équilibré, évitant une scission excessive tout en imposant des contraintes ciblées. Les actions d’Alphabet ont grimpé de 8 % en bourse, reflétant la confiance des investisseurs. L’industrie publicitaire reste fortement dépendante de Google, qui devrait conserver 25,5 % du marché numérique des annonces. Une autre affaire antitrust, portant sur le marché de la publicité numérique, est en cours, et pourrait mener à une scission de l’activité publicitaire de Google, ce qui transformerait profondément l’écosystème. En somme, si Google a évité le pire, le combat pour une concurrence équitable dans l’ère de l’IA n’est pas terminé.